En Ville N°152 | Mai – Juin 2017

ENVILLE_152_UNE

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Édito

Frontignan, ville d’eaux

L’histoire de Frontignan la Peyrade et de ses habitants est intimement liée à l’eau. Village de pêcheurs à l’origine, port de commerce sur l’étang d’Ingril dès le Moyen Age, port de l’amirauté jusqu’au XVIIe siècle, la ville s’est construite au “fil de l’eau”. Comme le quartier de La Peyrade, né autour des peïrades successives qui traversaient l’étang pour rejoindre la construction du port de Cette. Au XVIIIe, c’est autour du “canal des étangs”, que la ville a continué de se structurer. Ce sont aussi les marchands d’eau lapeyradois, qui disposaient de puits et ravitaillaient les Sétois en eau potable, qui ont contribué au développement de leur quartier. Je pourrais aussi évoquer les salins où ont travaillé des générations d’ouvriers, et égrainer de nombreux événements, jusqu’à la création du port de plaisance en 1982, qui montrent que l’eau marque l’identité de notre ville et l’ouvre sur le reste du monde…

La présence de l’eau essentielle à la beauté des paysages et à l’économie

Avec 8 km de plages entre deux eaux, des étangs protégés, un canal historique équipé d’une halte plaisance qui traverse la ville et un autre qui nous relie au port de Sète-Frontignan… la présence de l’eau est tout autant essentielle à la beauté de nos paysages qu’à l’économie de notre cité, avec la pêche et ses “petits métiers“, l’industrie agroalimentaire et le tourisme. Car c’est évidemment notre patrimoine naturel préservé, et en particulier l’eau, qui constitue un des attraits majeurs de la commune, classée station de tourisme. Au point que le port de plaisance, 6e de la région, qui propose déjà 600 places, doit être agrandi avec 100 anneaux supplémentaires pour répondre à la forte demande. Au point aussi que nous portons un projet d’augmentation de la halte plaisance de 32 à 69 places.

Mais cette situation géographique privilégiée, source de richesses, est aussi synonyme de contraintes voire de dangers. Des dangers de tous temps connus et de mémorables inondations. Comme en 1907, où on circulait en barque dans les bas quartiers de la ville sous l’eau pendant une quarantaine de jours, ou encore en 1930 et plus près de nous, en 1982, où 300 personnes du quartier de la plage ont dû être évacuées. Si les risques d’inondation ne sont pas nouveaux, ils ont été renforcés par l’urbanisation éclatée et consommatrice d’espaces des années 80, sûrement aussi par le dérèglement climatique, conduisant ainsi les pouvoirs publics à les prendre en compte et, plus encore après le désastre de la Faute-sur-Mer en 2010, à mettre en place de nouveaux moyens pour de nouvelles protections.

Continuer à investir pour résoudre les problèmes d’inondation

Ainsi, pour assurer la sécurité des personnes, l’État a intégré le risque comme contrainte d’aménagement dans des plans de prévention des risques d’inondation qui définissent les zones inondables et y interdisent ou réglementent la constructibilité. Mais au-delà de ces nouveaux règlements qui s’imposent légitimement à tous, des actions de prévention et de réduction des risques d’inondations doivent être mises en œuvre. Et elles ne peuvent s’envisager qu’avec la CABT. Le dossier de la gestion des eaux pluviales, nouvelle compétence intercommunale, doit être traité à sa juste mesure et en priorité.

Comme pour le lido et la lutte spécifique contre la submersion marine, la CABT doit continuer à investir pour résoudre, sur tout le territoire, tous les problèmes d’inondation qui mettent à mal les personnes et les biens du bassin versant, et peuvent, aussi, engager la responsabilité pénale des maires. Pour cela, il faut un plan d’envergure qui doit mobiliser 80 M € sur les 10 ans à venir, là où aujourd’hui seuls 2 M € sont prévus par an. Une nécessité absolue pour les communes qui n’ont pas, seules, les moyens de financer les aménagements nécessaires. Il en va de l’ensemble des populations soumises au risque comme de la qualité de l’eau de la lagune de Thau, condition sine qua non à la poursuite des activités, en particulier conchylicoles, qui y sont menées.

Refaire de l’eau un atout

Ces contraintes doivent aussi nous rendre imaginatifs en termes d’aménagement du territoire. Au-delà de la reconstruction de la ville sur elle-même, politique mise en œuvre depuis 1995 bien avant tous les Grenelle, il faut refaire de l’eau un atout dans les endroits où elle a teinté de rouge la carte des dangers. En recreusant, par exemple, la darse du plan du bassin, Frontignan pourrait recréer un port en cœur de ville, écrivant ainsi une nouvelle page de l’histoire de notre ville d’eaux.

Pierre Bouldoire

Maire de Frontignan la Peyrade
Vice-président de la CABT
1er vice-président du Conseil départemental de l’Hérault