Cinéphile depuis sa tendre enfance, Gilles Galabert a consacré sa vie au 7e art au sein du ciné-club Les Hallucinés. À la tête de cette association au moment de la création des Emmuscades, il raconte son enthousiasme pour une expérience de cinéma qui se partage, des séances débats dans l’ancien CinéMistral aux projections à la belle étoile dans les vignobles de Frontignan la Peyrade.
Chez Gilles Galabert, la passion du cinéma ressemble un peu à sa madeleine de Proust. C’est un enfant du pays né il y a 74 ans à Frontignan la Peyrade, au premier étage d’une bâtisse donnant sur la place Jean-Jaurès, et dont l’arrière-grand-mère tenait depuis 1905 un bar au 16, boulevard de la République, après avoir dirigé le relais des calèches et chevaux à l’entrée de Sète. Bistrot familial ouvert tous les jours de la semaine, la tante du jeune Gilles est chargée, chaque dimanche, de l’emmener au cinéma Escot à quelques pas. C’est l’une des trois salles obscures que compte la ville en ce temps-là, avec le Cinéma Familial dans l’ancienne chapelle des Pénitents blancs où se trouve l’actuel musée municipal et les Variétés à l’emplacement du Carrefour City, rue Anatole-France. Pour sa première séance à l’âge de 6 ans, il est bouleversé par La Strada, film culte de Fellini, qui marquera au fer rouge son amour du 7e art. Plus tard, se rendant à Montpellier à l’école hôtelière, il guette tous les mercredis sur le quai de la gare Denis Escot, le projectionniste, pour lui demander quel sera le prochain film à l’affiche.
Gilles Galabert s’est également essayé au théâtre avec la Compagnie théâtrale de la Gardiole de 1989 à 2002. Un passage dans les coulisses du jeu d’acteur pour faire vivre les émotions au public comme il a eu le plaisir de les recevoir face à l’écran. Le projet le plus insolite qu’il ait mené aux côtés de cette troupe est une pièce de théâtre nommée En pleine mer, jouée sur un radeau grandeur nature à la piscine.
Aux origines des Emmuscades
S’il reprend avec son beau-frère le bar familial de 1983 à 2008 transmis en amont à son grand-père puis à ses parents, il ne cesse de nourrir son appétence pour le cinéma en devenant membre assidu du cinéclub Les Hallu’cinés créé en 1999. Patrick Bedos, programmateur de métier et pour l’association, sélectionne et présente le film à chaque séance au CinéMistral inauguré un an auparavant, puis un débat s’ensuit entre les spectateurs. En 2007, Gilles Galabert prend la présidence des Hallu’cinés et participe au lancement des Emmuscades : « Dès l’origine, on voulait faire du cinéma autrement, en mêlant du local, des dégustations de muscat et de moules. » L’année de lancement, seul un mas viticole répond à l’appel et accueille l’événement pour deux séances sur l’été. Le succès est au rendez-vous et le Domaine de la Plaine fait des émules grâce au bouche-à-oreille.
C’est ainsi que les Emmuscades, ayant trouvé leur public, fêteront 20 ans d’existence l’année prochaine : « Pour l’instant, rien n’est fixé mais on aimerait marquer le coup pour le prochain anniversaire avec une proposition punchy et des séances supplémentaires. » En attendant, le thème de la saison 2025 s’intitule Nous sommes tous au paradis pour symboliser à la fois le cadre idyllique en plein air, les décors fabuleux des vignobles et les longs-métrages sélectionnés qui dissèquent l’âme humaine. Chaque année, l’association finance la location des films choisis et le travail du projectionniste de cinéma itinérant avec le soutien des vignerons qui offrent des bouteilles de muscat, de la ferme marine de Vic-la-Gardiole qui prépare la brasucade de moules et des services municipaux qui gèrent l’installation du matériel. « Depuis 3 ans, nous travaillons avec la billetterie de l’office de tourisme [Archipel de Thau, NDLR] pour la vente des places. Nous continuons aussi à reverser 1 € par billet acheté à l’association SOS Méditerranée. »
En tout cas, l’homme féru de cinéma conserve la même flamme à chacune des séances dans les vignes : « Ce que je retiens, c’est l’ambiance conviviale et le fait de partager un moment privilégié, ensemble. Les gens se réunissent, parfois s’y donnent rendez-vous d’année en année. » Pour sûr, dès la prochaine Emmuscade au Château de la Peyrade le 23 juillet, vous y croiserez Gilles Galabert à l’entrée, fidèle depuis toujours à l’accueil des spectateurs.